摘要
Reviewed by: Atlas des égarements : Études géocritiques by Bertrand Westphal Zhang Qiang Bertrand Westphal. Atlas des égarements : Études géocritiques. Paris : Les Éditions de Minuit, 2019. Pp. 192. Price 19 €. Cet ouvrage fait suite à la « trilogie géocritique » parue chez le même éditeur, à savoir La Géocritique (2007), Le Monde plausible (2011) et La Cage des méridiens (2016), et il constitue une nouvelle percée de la géocritique dont l'auteur est le fondateur et le principal promoteur. S'il cherche à sonder l'interaction entre l'espace réel et l'espace littéraire dans ses ouvrages précé-dents, Bertrand Westphal n'hésite pas cette fois-ci à franchir les frontières littéraires pour embrasser un large éventail de représentations visuelles de l'espace. Avec la parution de cet ouvrage, on assiste en effet à un « tournant pictural » qui marque désormais la recherche en géocritique. [End Page 164] L'Atlas des égarements est un recueil composé d'un long préambule et de 11 textes issus de conférences données par l'auteur entre les années 2013 et 2018. Dans cet ouvrage, l'auteur adopte une écriture dite « rhizomatique », dans l'acception deleuzienne du terme : l'ouvrage se lit comme un puzzle postmoderne susceptible de résister à la lecture séquentielle. On peut se déam-buler sur les sentiers qui bifurquent tracés par Westphal : carte, cinéma, chanson, arts plastiques, performance, architecture, etc. Malgré la diversité thématique, les articles réunis sont agencés autour d'une piste de réflexion : comment rendre compte de l'espace qui ne cesse de se déterri-torialiser et de se reterritorialiser à l'ère de la mondialisation ? Remettant en question l'idée toute faite selon laquelle la carte passe pour une copie du réel, Westphal passe au crible des « cartes », au sens large du terme, créées par des artistes de diverses origines, souvent issus de régions « périphériques ». On pourrait citer entre autres le Pékin filmé par Ai Weiwei (22–23), la moquette Kimbembele Ihunga conçue par Bodys Isek Kingelez qui veut reproduire son village natal congolais (62–63), la carte inversée dessinée par Torres García (68), le poème sonore Vaduz composé par Bernard Heidsieck ayant pour but de transformer la carte mondiale en texte (118–20), The New World Political Map de Hong Hao (133), etc. Toutes ces cartes non conventionnelles visent à proposer une lecture plurielle de l'espace réel, ou une alternative aux représentations « exactes » du monde fournies par des outils informatiques tels que Google Earth. Westphal souligne qu'il n'existe pas une relation univoque entre territoire et carte, et que toute carte scientifique « tend à la stabilisation » (22) et saisit seulement une facette d'un lieu à un moment donné. Elle ne peut par conséquent rendre compte de la fluidité, de l'hétérogénéité et de l'« épaisseur diachronique » (41) qui marquent l'espace. Ainsi, tout comme la littérature, il incombe aux cartes artistiques de jouer leur rôle de « laboratoire du possible » (186). Autrement dit, l'enjeu est d'inviter les lecteurs, à travers ces variations cartographiques, à « échapper au lieu commun » (12) qui fige leur paysage mental et de s'ouvrir sur une diversité de mondes possibles. [End Page 165] Zhang Qiang Université du Shandong Copyright © 2022 L'Esprit Créateur